Je connais bien mes petits Français, et je suis certain que bon nombre d’entre eux font des bonds au plafond à la seule lecture de ce titre. « Mais comment osez-vous parler de “marché sexuel” ? Vous devriez avoir honte de marchandiser une aussi belle chose que l’Amour. Dégoûtant personnage ! Obsédé économique ! Pervers idéologique ! » Ne vous emballez pas, ce n’est pas si matérialiste que vous le croyez. Le marché dont il est question ici n’est pas un lieu d’échange de denrées et de biens de consommation. C’est une métaphore des choix que font de multiples individus à la recherche de partenaires. Vous rencontrez des femmes, certaines vous plaisent, certaines semblent accessibles : vous soupesez vos options. Elles vous considèrent de même : une possibilité plus ou moins tentante et plus ou moins abordable, un homme parmi d’autres. Vous les classerez sans même y penser par degré de désirabilité. Les autres hommes sur le marché en font autant. Chaque femme est plus ou moins désirée par un certain nombre de courtisans potentiels, ce qui lui confère une valeur sur le marché. De même, chaque homme est perçu comme plus ou moins désirable par les femmes, ce qui constitue sa valeur sexuelle.
En 2012, Rollo Tomassi avait proposé un graphique schématisant l’évolution de la Valeur sur le Marché Sexuel (VMS) des hommes et des femmes :
Ce graphique illustre une idée, il ne représente pas des données (nous en aurons après ces explications). La valeur est exprimée par une note de 0 à 10, ou 10 représente le maximum de désirabilité possible du point de vue de l’autre sexe. Dans la vision tomassienne de la VMS, une femme atteint le maximum de sa désirabilité pour les hommes dans la première moitié de la vingtaine. Sa valeur sexuelle décroît ensuite inexorablement jusqu’à ne plus être que résiduelle dans la quarantaine et au delà. Énoncer la péremption rapide du désir masculin ne manque jamais de provoquer la colère des femmes ayant largement dépassé leur pic de VMS. Pourtant, les femmes dans la quarantaine disent volontiers que leur âge les a rendues « invisibles », c’est à dire que l’attention des hommes n’est plus dirigée vers elles. C’est un constat banal, dont les femmes discutent tout en espérant que beaucoup d’hommes continuent de l’ignorer.
L’évolution de la VMS masculine est plus complexe. À 15 ans, le garçon n’est guère attrayant (sauf pour certaines femmes mûres pratiquant le détournement de mineur). À vingt ans on est un jeune homme, mais cela ne cause pas chez les femmes le même enthousiasme que les hommes ont pour les jeunes femmes. À mesure que l’homme s’accomplit, physiquement, mentalement et socialement, sa valeur sexuelle progresse et culmine dans la seconde moitié de la trentaine. Au delà, sa désirabilité décroît avec l’âge, mais bien moins rapidement que pour une femme.
À ce stade, les hommes conditionnés à s’aligner sur l’impératif féminin protesteront qu’une femme peut-être très belle à quarante ans ou plus. Certes, mais la même femme à vingt-cinq ans n’était-elle pas encore plus désirable ? De leur côté, les femmes se décriront comme plus intéressantes à quarante ans qu’à vingt, plus expérimentées, plus délurées, etc. Ce qui est tout à fait juste, mais sans rapport avec l’instinct sexuel. Les hommes désirent — sans en être conscient — un corps apte à leur donner une descendance. Toutes les choses ce que nous trouvons jolies chez une femme (la forme du bassin, les masses graisseuses du fessier et des mamelles, la qualité de la peau et des cheveux, la jeunesse) sont des indices de leur capacité à enfanter et à allaiter.
Quant aux femmes, elles désirent instinctivement de la protection et de l’approvisionnement pour elles et pour leur progéniture, laquelle aura été engendrée de préférence avec les gènes d’un homme apte à réussir socialement, franchir tous les obstacles que la vie jettera sous ses pas, et même capable d’user de violence pour parvenir à ses fins. À défaut d’attraper l’homme idéalement dominant (un alpha), elles peuvent se reporter sur un brave type économiquement installé et convenablement sécurisant (un bêta). C’est ce qui se lit dans la VMS masculine : à partir de 30 ans, un homme est lancé sur une trajectoire professionnelle aisément évaluable, sa capacité à fournir du confort et de la sécurité à une femme est en ascension rapide et durable.
À l’âge de 30 ans, les hommes commencent tout juste à manifester une certaine proto-conscience de leur valeur sexuelle, alors que simultanément, les femmes prennent douloureusement conscience de leur incapacité à rivaliser indéfiniment avec leurs concurrentes sexuelles. […] Le conflit réside dans le fait que les hommes commencent tout juste à réaliser leur potentiel tandis que les femmes doivent lutter contre le déclin du leur.
C’est la phase primaire pendant laquelle les femmes doivent jouer leurs atouts biologiques dans l’espoir que les meilleurs hommes dans lesquels elles peuvent investir leur hypergamie ne seront pas conscients de leur VMS potentielle au point de choisir une femme plus jeune (22-24 ans) pendant son pic de valeur. J’ai écrit à ce sujet dans La Menace :
« Rien n’est plus menaçant et en même temps plus attirant pour une femme qu’un homme qui est conscient de sa propre valeur pour les femmes. »
La confluence entre les VMS comparées des deux sexes est peut-être le stade le plus critique de la vie pour l’hypergamie féminine. [La femme] doit être capable de le maintenir dans l’ignorance de sa VMS potentielle suffisamment longtemps pour optimiser son hypergamie. Dans le cas de l’homme, son impératif est de s’éveiller à sa VMS (ou à son potentiel) avant de prendre des décisions qui changeront sa vie en se basant sur un manque de compréhension de son potentiel.
Tous les hommes que j’ai connus et qui m’ont dit qu’ils auraient aimé connaître l’androsphère ou lire mes écrits avant de se marier ou de mettre « accidentellement » en cloque leur petite amie TPL [Trouble de la Personnalité Limite] regrettent de ne pas avoir eu cette prise de conscience de leur potentiel. Ils ont accordé plus d’importance aux femmes qu’à leur propre potentiel, avec un pic de VMS atteint plus tard — ou ils n’ont jamais atteint ce pic parce qu’ils n’ont pas eu cette prise de conscience.
Rollo Tomassi, « Final Exam — Navigating the SMP », therationalmale.com, 2012
Bien. Maintenant que vous connaissez la théorie de la Valeur sur le Marché Sexuelle, est-ce juste l’effet de notre imagination sexiste ou est-elle vérifiable ? Heureusement, nous vivons dans une époque où les données sont abondantes. Christian Rudder, le cofondateur de l’application de rencontre OkCupid a publié de nombreux graphiques basées sur le comportement des utilisateurs, dont celui-ci :
On voit très clairement les deux pics de valeur sexuelle décalés dans le temps et la supériorité de la valeur résiduelle de l’homme passé son pic. Une chose qui n’était pas visible dans l’appréciation subjective de la VMS sur le schéma de Rollo : le pic de désirabilité féminin est de plus grande amplitude que le pic de désirabilité masculin (les femmes sont plus courtisées par les hommes que l’inverse). Il y a cependant une divergence importante entre les données de Christian et le schéma de Rollo : le pic masculin arrive beaucoup plus tôt sur OkCupid, en seconde moitié de vingtaine. La raison ? La majorité des utilisateurs d’OkCupid a moins de 35 ans. C’est un échantillon anormalement jeune comparé à la population dans son ensemble.
Qu’à cela ne tienne : Alex, l’auteur du blog CuriousGnu, a déniché un jeu de données qui englobe tous les âges : le nombre d’apparition des acteurs et des actrices à l’écran selon leur âge. Le cinéma américain est tout entier une entreprise de séduction des spectateurs. Les comédiens se doivent d’être désirables, leur carrière en dépend. Plus exactement, leur carrière suit l’évolution de leur désirabilité.
Sur le graphique, le pic de la carrière d’actrice est autour de 25 ans et assez étroit, tandis que le pic de la carrière d’acteur s’étale largement sur la trentaine — très proches des pics suggérés par Rollo Tomassi. Comme dans les données d’OkCupid, le déclin masculin est moindre que le déclin féminin, et le pic féminin est plus élevé que le pic masculin.
Conclusion : Ne vous emballez pas quand une trentenaire s’intéresse soudainement à vous alors qu’elle vous aurait dédaignée dans la vingtaine. N’ayant pu s’attacher un alpha et voyant sa compétitivité sur le marché s’éroder, elle cherche un bêta qui lui fournisse de la sécurité en échange d’un peu de sexe tiède. Passé 35 ans, un homme a plus de potentiel sur le marché qu’une femme de son âge, même après avoir passé son pic de VMS. Mieux : en tant qu’homme, votre valeur repose sur vos accomplissements (ce qui inclue les efforts consacrés à améliorer votre corps et votre mental). Contrairement aux femmes, nous pouvons entretenir et augmenter notre VMS jusqu’à un âge avancé. Même si vous avez manqué de sexe et d’affection durant votre jeunesse, cette trentenaire nécessiteuse n’est pas la meilleure chose qui puisse vous arriver. Si vous tenez malgré tout à nouer une relation avec, ayez toujours à l’esprit qu’elle a plus besoin de vous que vous d’elle. Vous aurez ainsi beaucoup plus de chance de construire une relation satisfaisante et durable que si vous la placez sur un piédestal de désirabilité dont elle sait intimement qu’elle est définitivement descendue.
J’ai trouvé cet article très intéressant cependant je ne suis pas convaincu au sujet de la comparaison avec les acteurs. En effet, quel rapport avec le désir sexuel dans tout ça ? Même si la similitude des données est intéressante
Les moches font moins carrière à l’écran que les beaux et les belles. Comme la publicité, le cinéma joue avec le désir — tout particulièrement le cinéma américain.
Intéressant, justement, le graphique sur les acteurs et actrices. Pour l’indice des femmes, il faudrait faire le même avec les actrices et modèles pornographiques, onlyfan et compagnie. Comme pour l’hypergamie féminine sur les applis de rencontres, c’est là-dessus que le désir primal masculin est réellement libéré. Je suis déjà tombé sur des sites « MILF » avec des actrices de 28-30 ans. Ça veut tout dire, hahaha.