— Antoine ! Antoine !
— Mmmh ?
— Antoine ! Tu rêves ? Nous t’attendons pour la débauche.
— Aaaaaaaaah ! Mais qu’est-ce que je fais ici ? Ne me touchez pas !
— Oh, qu’il est grognon au réveil ! Antoine chéri, c’est l’heure de l’orgie. Bisous !
— Arrière, tentatrice !
— Pas de bisous ? On passe aux choses sérieuses tout de suite ?
— Noooon ! Lâchez ma bure ! (Mais pourquoi suis-je accoutré ainsi ?)
— Tu ne veux pas t’amuser avec nous ? Regarde, nous manquons d’hommes cette nuit. Guy est déjà bien occupé avec nos copines, il ne sait plus ou donner de la…
— Je ne veux pas le savoir ! Je pratique la rétention du sperme pour devenir un homme supérieur.
— Ah, un moine chrétien-taoïste ? C’est singulier. Mais il faut pratiquer chéri, sinon ton zizi va s’atrophier. Tu peux me faire de la rétention partout-partout. J’aime quand c’est dur et que ça dure…
— Non, je dois garder mon énergie virile pour atteindre mes objectifs.
— Mais quels objectifs ? Nous ne sommes pas assez jolies pour toi ? Pas assez jeunes ? Pas assez douces ? Quels meilleurs objectifs pour un homme que de caramboler moult jeunes femmes ?
— Je me réserve pour une femme vertueuse, loyale et sage. Pas une troupe de nymphomanes dépravées.
— Dépravé toi-même, petit cochon frustré ! Tu vois chouchou, si tu avais plus d’expérience, tu saurais que les femmes ne sont préoccupées que d’elles-mêmes, fort peu sages et fidèles à leurs seules impulsions.
— Je ne vous crois pas. Laissez-moi sortir d’ici ! Et d’abord : où suis-je ?
— Dans la chambre des rêves, chéri. Ton esprit a laissé ton corps se reposer. Il a poussé la petite porte qui mène à l’inconscient. Ici vivent tes désirs refoulés : des blondes, des rousses, peu de brunes. Tu n’aimes pas les brunes ? Pas assez coquines dans tes fantasmes ?
— C’est… c’est impossible. Trois mois déjà que j’ai renoncé à la masturbation. L’emprise des femmes a dû me quitter.
— Ben non, chouchou. Si tu ne t’es pas dégorgé le poireau depuis trois mois, c’est normal que tu fasses des rêves érotiques. Regarde, avec cette tonsure tu as même une tête de gland !
— Je ne veux pas ! Je veux être maître de moi !
— Mais, chéri, tout ce qui vit est sexuel. Tu es un homme, tu ne peux pas être froid comme une pierre. Pas tant que tu vis.
— Quel cauchemar…
— Oh, tu es méchant ! Les filles, tenez le bien, je vais le détendre.
— Mais non ! Je ne consens pas !
— Mais si, mais si. C’est ton rêve après tout. Je soulève la bure et… Oh ! Le vicieux ne porte rien en dessous ! Et le pauvre petit oiseau est là, tout congestionné, en mal d’affection. Viens dans ma main…
— Non ! Nooooon ! À moi Jordan Peterson ! Au secours ! Aaaaaaaah !
— Là, c’était rapide… Il va falloir changer tes draps ce matin. Ne pleure pas chéri. tu reviendras nous voir dans la chambre des rêves. Nous serons toujours là pour toi, même quand tu auras une copine réelle. Même quand tu seras seul. Même quand tu seras vieux. Même quand tu ne banderas plus. Bisous !
Illustration : La Tentation de Saint Antoine, par Robert Auer, 1917