L’Effrontée du mois de décembre 2024 : Kate

— Coucou toi ! Tu es mon cadeau rien qu’à moi.

— Miaou ?

— Oui petite coquine d’amour. Rien qu’à moi, à moi, à moi… Nous allons être super-heureuses toutes les deux. Finis les connards immatures, les nazes, les radins, les mal-baisants, les erreurs de casting, les mecs toxiques, les débutants aux mains moites, les petites bites, les psychopathes… Finis ! Ni-ni-ni-ni… Ni-ni-ni-ni. Finis quoi.

— Miaou.

— Exactement : « miaou ». Il n’y a plus que moi. Moi. Moi-moi-moi. Et toi, ma choupinette. Nous allons passer de super soirées toutes les deux ! Nous n’avons besoin de personne. Toutes les deux. Toutes-toutes-toutes… les deux !

— Maaaaoow !

— Tu dois avoir faim. Maman va te donner du bon loloooo… Oh, je suis complètement gaga, si mes potes me voyaient ! Là, mon cœur… Si tu savais, mon chaton, tout ce que j’ai subi avant toi. D’abord il y a eu tout ceux qui m’envoyaient des dick pics sur Tinder. Je n’avais plus qu’à choisir. C’était pratique pour voyager, j’ai économisé des tas de nuits de Air BnB grâce aux mecs. Mais parfois ils voulaient une relation, genre : on va peut-être se marier, faire des gosses… Les relous !

— Miaaaou…

— Tu as bien bu, mon bébé ? Viens faire un câlin ! Ouiii ! Mon problème, c’est que je n’aime pas être seule. Mais j’aime être libre. Et j’aime plaire, mais quand je veux. Toi aussi tu aimes plaire. Regardez-moi ce petit ange… ces yeux ! J’adorerais avoir tes yeux. Kikoukikou… Trop trognonne ! Avec des yeux de chatte ils m’auraient encore plus collé. Écoute-moi bébé : il ne faut jamais envoyer le premier message, il ne faut jamais répondre tout de suite, et s’il envoie trois messages il est trop en manque : élimine-le ! Comme ça, on évite les plus nazes. Rester indépendante. Pas de petit garçon fusionnel, pas de macho dominateur.

— Rrrrrrrrr… Rrrrrrrrr…

— Hé, tu ronronnes petit chou ! Tu es bien sur les seins de maman, hein ? Mais écoute, il faut que tu saches comment choisir un mec. Il doit être : beau… enfin, pas nécessairement beau mais attirant. Éduqué, pas teubé évidemment. Drôle… mais pas le genre ridicule. Hyper-réactif, mais pas dans le besoin. Un peu distant même, mais pas distant… plutôt… mystérieux. Sensé, carré, tu vois, pas dingo, mais créatif, audacieux. Gentil, adorable, c’est super-important. Mais pas mou, hein ? Pas une serpillière. Il doit avoir une voie chaude, masculine… et dire des trucs intelligents mais pas chiants.

— Maaw ? Rrrrrr…

— Surtout, il doit me faire sentir que je suis spéciale. Qu’il me désire vraiment. Ça doit être fort… Mais pas oppressant. Là, tu vois, je ne suis pas oppressée. On est toutes les deux. On va dîner ensemble. On va se poser dans le canapé (je n’ai pas le courage de l’ouvrir ce soir) et regarder une chouette série jusqu’à minuit. Après on fera des snaps avec les copines pour se souhaiter bonne année. J’ai trop envie qu’elles te voient ! Après, je ne sais pas, peut-être une autre série. Ou alors Titanic, ça fait longtemps que je ne l’ai pas repassé. Ou peut-être des compils de fails. J’aime bien ça maintenant : des gens qui se font mal, des sorties de route, des mariés qui tombent sur leur pièce montée. Je pourrais en regarder jusqu’à l’aube.

Illustration : At Play, par Charles Edward Perugini

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