L’Effrontée du mois de septembre 2021 : Manon

Je crois que ça va un peu trop loin là. Je voulais bien qu’Abdel me présente à ses amis, mais je ne pensais pas me retrouver nue. Je peux comprendre qu’il éprouve une fierté débordante en sortant avec une femme blanche. C’est une revanche positive sur l’oppression coloniale et les préjugés racistes dont il est victime. Tout de même, il aurait pu me demander mon consentement avant de me déshabiller devant ses copains. Je dois être patiente, il a tant de chemin à faire pour se débarrasser des schémas sexistes et patriarcaux hérités de sa culture (que je respecte). Je dois lui parler de l’objectification du corps des femmes par le regard masculin. Il comprendra, il est si intelligent. Si différent.

Son ami doit-être dentiste, il est passionné par mes dents. Quelle spontanéité chez ces gens ! Ils n’ont pas été pervertis par la culture cis-genre-hétéro-patriarcale-blanche-écocidaire. Et lui… Qu’est-ce qu’il… Oh, non ! Il est gynécologue celui-là. Je ne veux pas les vexer mais… Tant pis, je ne peux pas stigmatiser des gens qui souffrent déjà d’être racisés et discriminés. Peut-être qu’il voit pour la première fois un clitoris ? C’est ça ! C’est sûrement ça ! Il découvre l’organe du plaisir féminin. Grâce à moi. Je suis tellement contente d’être venue !

Jean-Léon Gêrome, Le Marché aux esclaves, 1866
Le Marché aux esclaves, par Jean-Léon Gêrome, 1866

Write a Comment

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *