Sur la couverture blanche et sobre est dessiné le symbole du yin et du yang déformé : l’une des deux moitiés occupe la majeure partie du cercle. Sans doute une représentation du déséquilibre de la société contemporaine au détriment du masculin, même si le graphiste s’est gouré en inversant les couleurs (pour les Chinois, le masculin c’est la clarté, le féminin l’obscurité). Le titre du bouquin est Vers la féminisation ? Pour comprendre l’arrivée des femmes au pouvoir, et c’est un bon pote qui me l’a mis entre les mains. Je l’ai donc lu attentivement, en dépit de la réputation foireuse de son auteur : Alain Soral. La première édition date de 1999 et fut remaniée en 2007, à l’époque où ses déboires judiciaires commençaient tout juste.
Dans ce billet, je ne parlerai pas davantage du personnage public d’Alain Soral, ni des propos qui lui ont valu d’être si souvent traîné devant les tribunaux. Je me bornerai à discuter du contenu de ce livre-ci. Je note cependant qu’un type qui réussit à se faire condamner des dizaines de fois pour diffamation, injures, incitation à la haine et divers motifs similaires ne maîtrise pas (ou plus) le délicat exercice de l’expression publique. Bref, quelles que soient vos affinités éventuelles avec les opinions politiques d’Alain, vous conviendrez sûrement qu’il est parti en vrille depuis longtemps.
Coup de Freud
Les premières pages m’ont fait peur par le style un brin grandiloquent et l’usage expéditif de concepts philosophiques mystérieux pour moi et sans doute pour la plupart des gens (« dualisme transcendantal », « monisme dialectique », « néokantisme »… certes, chacun à son Kant-à-soi). Le texte reste cependant lisible et Alain détend irrégulièrement l’atmosphère en glissant un « fiotte » ou un « pédé », avec parfois un véritable effet comique. L’étalage de références intello-prestigieuses et de concepts philosophiques me paraît plus pardonnable chez un semi-autodidacte que dans les pavés longs et mornes des universitaires estampillés.
Plus que dans la philosophie, c’est dans la psychanalyse qu’Alain puise son modèle des différences de comportement entre homme et femme. (Dans les citations, j’ai inséré entre crochets les notes de bas de page dont il est friand.)
Du fait de la dissymétrie de l’œdipe, fille et garçon se retrouvent donc dans une situation affective inverse :
— le garçon refuse de grandir pour continuer à vivre avec sa mère l’amour parfait. [Ce qui explique que le jeune homme végétant dans l’attente nostalgique du retour de la mère mette un temps plus long à comprendre et à accepter les subtilités de la séduction.] Se résoudre à la séparation reviendra pour lui à accepter d’affronter le père et de faire sienne la douloureuse opposition amour/travail ;
— la fille veut grandir (d’où la maturité plus précoce) pour sortir de l’amour moins satisfaisant de la mère et aller vers l’amour du père. Pour elle, l’amour n’est donc pas cette passivité nostalgique opposée à l’effort, mais son projet : le travail de la séduction.
p. 44, ch. La dissymétrie de l’œdipe
Les pages « freudiennes » sont étonnamment pilule rouge, proches de la compréhension des comportements des deux sexes dessinées par les données biologiques, psychologiques et statistiques. Pour moi qui préfère les sciences expérimentales et les constats factuels à la subjectivité des récits psychanalytiques, la réussite d’Alain à bâtir sur le complexe d’Œdipe un raisonnement aboutissant à de justes conclusions ne lasse pas de m’épater. Je ne sais s’il faut en attribuer le mérite réel à la psychanalyse ou à ses années de pratique de la drague. Ensuite Alain tente de développer une théorie unissant sexe et politique qui m’a moins impressionnée.
Marx attaque
Alain a beaucoup lu d’auteurs marxistes (le texte est précédé d’une citation de Georg Lukács et d’une dédicace à Michel Clouscard) et ne manque pas de souligner que « la domination » et « l’oppression », chères au militantisme victimaire, s’exercent beaucoup plus manifestement entre les classes sociales qu’entre les sexes.
Dans l’imaginaire collectif, la femme sexuellement opprimée a remplacé le prolétaire. [Ainsi la bourgeoise de gauche, par le féminisme, a-t-elle réussi à spolier le travailleur de son unique prestige : le prestige moral de l’opprimé.] Une vision fantasmatique de l’histoire nous la montre coupée en deux : avant, souffrant sous le joug d’un machisme fasciste ; aujourd’hui (en gros depuis Mai 68) émancipée d’un coup par la société de consommation. Libérée de ce quasi-viol collectif par les magazines féminins, maîtresse enfin de son corps et de son désir.
Dualisme grossier dans lequel on a du mal à ranger les innombrables maîtresses-femmes du passé : prêtresses, reines, duchesses, courtisanes, intrigantes, libertines, femmes de lettres, rentières, demi-mondaines… qui peuplent l’histoire sans la moindre discontinuité.
Lendemains qui chantent, qui grincent aussi un peu à la vue des hordes de vendeuses, caissières, standardistes et autres shampouineuses vivant chichement d’un salaire rogné par le chômage et la flexibilité. […]
S’il existe une condition humaine (soit l’état historique des forces productives et des rapports de production), personne n‘osera contester que la condition d’un homme dépend d’abord de sa position sociale.
Il n’existe donc pas de condition masculine mais une condition ouvrière, une précarisation du salarié, une défiscalisation du rentier…
Alors de deux choses l’une :
— soit la femme échappe aux catégories sociales, auquel cas il n’existe ni ouvrières, ni employées, ni rentières… ce que la réalité semble contester ;
— soit ce sont plutôt les catégories sociales qui ont tendance à lui échapper, pour cause de réduction psychologiste précédemment abordée. [Ce qui tendrait à démontrer que les féministes restent au fond de leur tête des femmes au foyer !]
pp. 67-68, ch. Une vision fantasmatique de l’histoire
Articulant sexe et classe dans son travail, Alain Soral est donc un auteur intersectionnel que seule sa situation d’homme cis-genre-blanc-hétéro a pu invisibiliser dans le champ des études de genre dominé par les fiottes féministes. (Oui, je plaisante. Vous en doutiez ?) Blague à part, la spoliation du « prestige moral de l’opprimé » fonctionne en effet à plein tube dans ce vieil hymne du MLF, fièrement interprété lors d’un récent meeting de soutien au candidat d’union de la gauche, des verts et des derniers communistes encartés :
Nous qui sommes sans passé, les femmes
Nous qui n’avons pas d’histoire
Depuis la nuit des temps, les femmes
Nous sommes le continent noir.
Refrain :
Debout femmes esclaves
Et brisons nos entraves
Debout, debout, debout !
Asservies, humiliées, les femmes
Achetées, vendues, violées
Dans toutes les maisons, les femmes
Hors du monde reléguées.
(Refrain)
Seules dans notre malheur, les femmes
L’une de l’autre ignorée
Ils nous ont divisées, les femmes
Et de nos sœurs séparées.
(Etc.)
Que cette vision hallucinatoire d’une sororité homogène, sans différences de niveau de vie, de nationalité et d’éducation, et subissant « depuis la nuit des temps » l’équivalent de la traite négrière n’ait provoqué ni l’ire des militants anti-racistes, ni l’hilarité des politiciens prétendant encore vaguement se préoccuper des travailleurs en dit long sur l’acquiescement de l’ensemble de la société, hommes inclus, aux lubies féministes. La femme n’est pas une catégorie sociale, en effet… sauf dans la tête de tout le monde.
Symbole de luxe et d’oisiveté, la féminité est donc devenue, par l’histoire, le signe social de l’appartenance ou de l’accession à l’élite. Une esthétique de la frivolité (préciosité, élégance, apparat) par laquelle le nanti marque sa distance avec la masculinité austère du monde du travail, dans lequel il rejette aussi bien l’ouvrière que l’ingénieur. […]
Mais l’association du travail à la masculinité de la production des artefacts, a eu pour effet pervers de rejeter dans l’ombre cet autre travail tout aussi essentiel et respectable qu’est la maternité.
Travail féminin de la procréation et de l’éducation des enfants non reconnu par la conception masculine, mais aussi par les féministes. Revendiquer le droit au travail pour les femmes revenant en effet :
— à ignorer, au nom d’une conception éminemment machiste [Le féminisme se révélant sur le plan du travail, comme sur celui du désir, une soumission non sue à la masculinité.], le travail de la maternité et du maternage accompli par les femmes depuis la nuit des temps ;
— et par conséquent, à se faire le chantre de la double journée.
Du coup, les femmes qui étaient traditionnellement copropriétaires et cogestionnaires d’une petite entreprise familiale (la famille), au sein de laquelle elles accomplissaient un travail valorisant (l’amour et l’éducation des enfants), se retrouvent aujourd’hui, pour la plupart d’entre elles, employées subalternes. Salariées sous-payées d’une entreprise qui ne leur appartient pas (la Société Anonyme), à servir huit heures par jour la soupe à un homme qu’elles n’ont pas choisi (le patron), avant de retourner la servir chez elles. […]
Mais cette revendication des femmes face au travail n’a pu devenir légitime que parce que leur égalité y est devenue réelle. Le progrès technique (intégralement dû aux hommes soit dit en passant) et le développement du secteur tertiaire survenus ces trente dernières années, n’exigeant plus cette force physique qui faisait de la masculinité une qualité supérieure, souvent nécessaire et déterminante. [C’est pourquoi cette revendication égalitaire n’a, par exemple, toujours pas de sens pour le travail de chantier où une femme ne peut pas fournir le travail d’un homme à durée égale.]
Ce que les féministes présentent avec orgueil comme une conquête politique n’est donc, en réalité, que la conséquence inéluctable de l’évolution du travail, et notamment de la progression de la standardisation. Ce qu’elles présentent comme l’intérêt des femmes étant plutôt celui de la productivité, donc de la rentabilité.
pp. 102-105, ch. Le féminisme et la politique
Ici l’analyse marxiste d’Alain loupe un ressort pas du tout économico-politique : l’intérêt du travail, pour les femmes, c’est de pouvoir poursuivre le plus longtemps possible leur quête de l’alpha — l’homme qui cocherait miraculeusement toutes les cases de leur désir instinctif et qu’elles parviendraient à apprivoiser pour en faire un approvisionneur docile (mais pas trop, sinon il ne serait plus excitant).
Si je me réjouis que Vers la féminisation ? remette au centre de la discussion les conditions économiques et le corps des individus, je déplore d’y trouver les impasses typiques des militants marxisants. Alain… Pardon de te le dire brutalement : les gens ne veulent pas être libérés de leur patron. Car la bourgeoisie, que tu qualifies de parasitaire, joue bel et bien un rôle dans l’économie : fournir (et imposer) aux travailleurs l’organisation de la production qu’ils ne sont pas fichus de créer eux-mêmes. « Rendre les moyens de production aux travailleurs », c’était juste une blague. Où sont les centaines de milliers d’entreprises coopératives qui auraient pu être créées par les mouvements ouvriers depuis plus de 150 ans ? Nulle part. Les partis et les syndicats socialistes/communistes ont préféré la cogestion avec les capitalistes et les ouvriers la consommation grâce au capitalisme. Les permanents syndicaux ont pu avoir leur voiture de fonction et les militants leur voiture à crédit. Tout le monde était mécontent en apparence mais bien content au fond. Le règne de la marchandise ne s’est pas imposé contre les désirs humains fondamentaux mais bien grâce à ceux-ci : avoir le plus de confort et de sécurité possible, et poursuivre ses pulsions sexuelles avec le moins d’entraves possible.
Le dessous Descartes
L’homme et la femme n’existent pas l’un sans l’autre, il faut qu’ils s’aiment et qu’ils s’accouplent pour que l’humanité soit. La dissociation abstraite qui fait exister l’homme et la femme séparément, mais l’homme contre la femme [Alors qu’il n’y a pas, qu’il n’y a jamais eu de guerre des sexes mais une psychologisation féminine et bourgeoise de la lutte des classes.], provient de la vision individualiste et de la méthodologie qui l’accompagne. [Systématisée au XVIIIe siècle par le Discours de la méthode de René Descartes et le sujet transcendantal du « cogito ».]
p. 163, ch. Conclusion : ni le corps ni l’œdipe ne sont des démocraties
C’est ici que je tombe en sérieux désaccord avec Alain Soral : il y a toujours eu une « guerre des sexes », parce que les besoins reproductifs des hommes et des femmes sont radicalement différents. Il n’est nullement nécessaire que l’homme et la femme s’aiment pour que l’humanité soit. Il est seulement nécessaire que les hommes aiment suffisamment les femmes pour leur apporter l’approvisionnement et la protection dont elles ont besoin pour elles-mêmes et leur progéniture, et d’autre part que les femmes préfèrent certains hommes pour maximiser les chances d’être fécondées selon les attentes de leur instinct. Je vais aller plus loin : la forte sélection des hommes par les femmes implique que les femmes n’aiment pas les hommes en général. Elles peuvent aimer certains hommes, mais pas les hommes. La dissociation entre les sexes n’a rien d’abstraite et le brave René n’y est pour rien. Je trouve contradictoire qu’Alain entretienne cette idée de réciprocité amoureuse après avoir expliqué que les constructions mentales et sentimentales du garçon et de la fille sont entièrement divergentes du fait même de leurs complexes d’Œdipe asymétriques. Tout cela pour faire entrer de force dans une explication marxisante un phénomène bien plus primitif, profond et universel que la « lutte des classes ». Le Sexe est plus fort que le Capital, Alain. C’est le Sexe qui incite des hommes à en exploiter d’autres, parce que leurs femmes veulent plus de ressources pour leurs enfants.
Mais cet égalitarisme abstrait, systématique, ne peut rien au fait que ni le corps ni l’œdipe ne sont des démocraties :
— que les femmes fassent les enfants ne résulte pas d’une oppression sociale manigancée par les hommes [Croyance féministe et bourdieusienne due sans doute à une mauvaise compréhension de la VIe thèse sur Feuerbach de Karl Marx.] mais de la nature ;
— le respect du père n’est ni un abus ni une aliénation, mais une structure de représentations directement consécutive à la binarité des sexes.
pp. 163-164, ch. Conclusion : ni le corps ni l’œdipe ne sont des démocraties
Ça, d’accord. Même si je ne crois pas que beaucoup de féministes aient lu les Thèses sur Feuerbach ou même Bourdieu (et moi non plus).
Au moment où j’écris ce billet, le Mouvement français pour le planning familial fait beaucoup parler de lui grâce à une campagne de communication affirmant : « Au Planning, on sait que des hommes aussi peuvent être enceints. », tandis que la romancière J. K. Rowling se trouve ostracisée par le show business et les militant.e.s à cheveux bleus ou roses pour avoir rappelé qu’un transsexuel n’est pas réellement une femme. Plus de vingt ans après la première publication de Vers la féminisation ?, un certain nombre de nos contemporains opposent un refus de plus en plus strident à cette notion élémentaire : on ne choisit pas son corps et l’on n’existe pas indépendamment de lui. Il se pourrait bien que la démocratie libérale, si l’on en pousse la logique individualiste jusqu’au bout, s’avère incompatible avec la vie biologique des êtres humains.
Finalement, Alain Soral tente de conclure sur une note optimiste et illusoire, un peu comme Emmanuel Todd dans Où en sont-elles ? Une esquisse de l’histoire des femmes.
Dans une perspective progressiste, il faut donc à la femme, en plus de s’émanciper de l’oppression économique (par l’union des travailleurs salariés), qu’elle s’émancipe aussi d’elle-même [En admettant pour commencer que si elle est restée jusqu’à présent un citoyen de second ordre, c’est d’abord parce que l’économico-politique est secondaire dans son esprit ; que le politique est d’abord la conscience masculine du monde.], ce qui revient alors à porter la lutte et la contradiction à l’intérieur de soi.
pp. 164-165, ch. Conclusion : ni le corps ni l’œdipe ne sont des démocr
Cela n’a bien sûr aucune chance d’arriver, pour la raison que donne Alain lui-même dans la note entre crochets : l’économico-politique, c’est masculin. Ce qui est féminin c’est de recueillir les fruits des efforts économico-politiques des hommes, pour approvisionner la famille telle que la perçoive les femmes : elles-mêmes au centre et leurs enfants autour. Semblablement, Emmanuel Todd expliquait que les femmes sont moins préoccupées du collectif en raison de la priorité qu’elles donnent à leur propre progéniture, tout en espérant qu’à l’avenir elles se préoccuperaient davantage du bien commun, maintenant qu’elles sont en position de « matridominance » dans les couches intermédiaires de la société. Décidément, quand il s’agit des femmes, les hommes sont d’indécrottables benêts.
Vers la virilité ?
Ce qui m’a fait le plus réfléchir, dans la prose expansive d’Alain Soral, c’est cette histoire de relation œdipienne mère-fils engendrant l’attente, chez l’homme, d’un amour parfait. À chaque fois qu’un homme prend la pilule rouge sur le comportement sexuel réel des femmes et la logique reproductive qui l’explique, le résultat est un profond abattement dont beaucoup ne semblent pas pouvoir sortir. Pour la plupart, nous avons vécu en espérant un amour total, réciproque et loyal avec une femme. Un amour simple, pur, inconditionnel comme l’amour maternel, mais avec le sexe en plus. Découvrir que les relations des grandes personnes sont inévitablement conditionnelles, que de surcroît le désir féminin est à la fois ultra-sélectif et antagoniste avec le couple (voire avec la civilisation), et réaliser enfin que l’on nous a raconté des bobards sur l’amour depuis tout petit, cela laisse un sentiment de vide affreux et quelque chose entre la colère et le chagrin.
Si l’on suit l’allégorie psychanalytique, nous avons manqué d’une figure paternelle qui vienne à la fois nous extraire du monde féminin et nous procurer la soif de devenir l’Homme à notre tour. Dans une société pacifique et tertiarisée, maternante et automatisée, que reste-t-il à accomplir ? La dignité du travailleur s’en est allée avec les usines dans ces pays que l’on dit réactionnaires (car ils n’ont pas d’hommes enceints et persistent à former des familles traditionnelles). Le conscrit et le mobilisé défendant la Patrie sont enterrés dans un autre siècle et même le soldat de métier pourrait finir par les rejoindre. Le « bon père de famille » vient d’être rayé des codes, longtemps après avoir perdu toutes ses prérogatives. Reste quelques niches masculines : sportifs, artistes, ingénieurs, dirigeants… tous de haut niveau et c’est bien le problème : ces aventures-là ne sont pas pour tout le monde. Et pourtant, je n’ai pas mieux à proposer aux garçons désespérés, quel que soit leur milieu d’origine et leurs capacités. Trouvez-vous quelque chose à accomplir, pour votre seul intérêt personnel et votre propre joie. Même si la société n’attend plus des hommes la force, le courage et l’intelligence qui la mouvait entièrement il y a quelques générations encore, vous êtes fait pour incarner ces qualités viriles. Oui, même si vous avez aujourd’hui des petits bras mous, le cerveau sucé par les écrans et la trouille de dire bonjour à la caissière, votre potentiel masculin est toujours là. Tant que vous ne l’embrasserez pas à pleine gueule, tant que vous resterez lové dans le confort en faisant vôtre les attentes féminines d’approvisionnement et de sécurité, ce qui est masculin en vous continuera d’agoniser douloureusement.
L’amour parfait ne viendra pas. Vous y avez goûté nourrisson, puis vous êtes tombé du Paradis, comme tous les hommes avant vous. Il n‘y a pas de retour possible, pas dans cette vie. C’est le monde réel qui vous attend, avec ses femmes impitoyables (et pourtant si anxieuses et dépendantes), le délabrement grandissant de ce siècle (on ne choisit pas son époque) et les cohortes de garçons paumés — pesants boulets — qui ne parviendront jamais à maturité. Pour le dire en terme marxisto-soralien : il vous faut sortir de la consommation (le féminin) pour aller vers la production (le masculin). Quand vous aurez réussi cette mue, vous aimerez l’homme que vous serez devenu et vous pourrez à nouveau aimer les femmes — cette fois comme un adulte, et non comme un enfant.
Intéressante dissection de ce livre….