Bilan économique de la France depuis 2017 (3e partie)
Pauvreté, pouvoir d’achat, conditions de vie… Je vous présente dans ce billet le contexte et les conséquences inquiétantes du déclin économique français.
Lorsqu’on les interroge sur leurs préoccupations, les Français répondent invariablement en citant trois enjeux liés à leurs conditions de vie : leur pouvoir d’achat, la santé et l’insécurité (L’immigration est aussi une préoccupation majeure, mais ce n’est pas l’objet de ce fil.)
La plupart des Français estiment que leurs conditions de vie se dégradent :
- 57% déplorent une baisse de leur pouvoir d’achat entre 2017 et 2021*.
- 71% estiment que le système santé évolue dans le mauvais sens.
- 92% disent que l’insécurité a augmenté ces dernières années.
(* Il n’existe pas de données d’opinion sur 2017-2024 à ma connaissance.)
Le pouvoir d’achat est complexe à mesurer en tant que tel, mais plusieurs métriques peuvent donner une indication intéressante. Par exemple, on observe que le taux de risque de pauvreté (approximant le taux de pauvreté) a augmenté, passant de 13% en 2017 à 15% en 2022, d’après Eurostat.
La France est tout simplement LE pays de l’Union européenne dans lequel la part de personnes en risque de pauvreté a le plus augmenté depuis 2017.
Les Français semblent avoir de plus en plus de mal à boucler sereinement leurs fins de mois. En moyenne, il leur manque une centaine d’euros par mois de plus qu’en 2017 pour ne pas avoir à se soucier de leur budget en fin de mois.
Pour la première fois depuis au moins 40 ans, la consommation alimentaire des ménages recule. Depuis octobre 2020, elle a plongé de plus de 10%.
Toutefois, le « pouvoir d’achat » tel que mesuré par l’INSEE augmente, d’environ 0,8% par an de 2017 à 2023. Très loin des +4% par an des Trente Glorieuses certes, mais l’époque n’est plus la même, et ce n’est pas la faute des politiques menées depuis 2017.
Eurostat mesure aussi une augmentation du pouvoir d’achat, en « consommation individuelle effective » en France entre 2017 et 2023. Ce n’est que la vingtième plus forte hausse de l’UE, mais plusieurs pays à PIB élevé comme l’Allemagne ou l’Espagne font pire que la France.
Ainsi, le ressenti des Français, le taux de pauvreté et la consommation des ménages convergent vers un recul du pouvoir d’achat des Français. Mais ce constat doit être nuancé, car d’autres indicateurs montrent que le pouvoir d’achat aurait augmenté. Faites-vous votre avis.
Au-delà du pouvoir d’achat et de l’appauvrissement des Français, se pose aussi la question de leurs conditions de vie. À commencer par la dégradation du système de santé. Ainsi, malgré la hausse de 54 milliards d’euros des dépenses de santé entre 2017 et 2023…
…il y a désormais 20.000 lits d’hôpitaux en moins…
…et la mortalité infantile augmente, à rebours de la tendance européenne. Au sein de l’Union européenne, seuls quatre pays ont une mortalité infantile plus élevée que la France : la Roumanie, la Bulgarie, la Slovaquie et la Croatie.
Enfin, la dégradation des conditions de vie, au-delà des enjeux purement économiques, c’est aussi la hausse de l’insécurité, que ressentent 92% des Français. Les agressions enregistrées par les forces de l’ordre ont augmenté de 30% entre 2017 et 2023.
Malgré la montée des violences, dans cette France où l’État dépense moins pour les missions d’ordre public que pour le paiement de son énorme dette, les effectifs des forces de l’ordre sont restés stables.
Dans ce contexte d’inquiétudes au sujet du pouvoir d’achat, de la santé et de l’insécurité, les Français ont de moins en moins d’enfants. Depuis 2014, la baisse de la natalité en France est l’une des plus fortes de l’Union européenne. Seuls quatre pays font pire.
Ainsi, à la crise des finances publiques, au recul économique et aux inquiétudes sur les conditions de vie, s’ajoute un nouveau problème : le déclin démographique.
Il y a heureusement quelques rayons de lumière parmi ces indicateurs angoissants. Par exemple, l’indice CAC 40 a augmenté de 40% depuis 2017. Certes, il n’a pas surperformé par rapport au DAX allemand, mais il a atteint en 2024 son plus haut niveau historique.
Je vous invite donc à faire vos propres recherches pour compléter ce que vous aurez appris avec cette série de fils, qui ne peuvent pas être exhaustifs. Faites tout de même attention à la qualité des indicateurs que vous regardez.
Par exemple, la hausse des investissements directs étrangers (IDE) entrants observée en France depuis 2017 est-elle vraiment un signe de robustesse économique ? Pour référence, les IDE entrants représentent 20% du PIB du Mozambique, 5% en Somalie mais 2,9% en Allemagne en 2022.
Conclusion
Ce fil vient donc clôturer une série de publications sur le bilan économique de la France 2017.
Le premier volet était consacré à la crise de la dépense publique.
Le deuxième volet était dédié à l’évolution des principaux indicateurs macro-économiques.
J’espère que ce troisième volet, plus éclectique, vous a intéressé et a permis de mettre quelques chiffres sur les conséquences et le contexte plus général du déclin économique du pays. Si c’est le cas, je vous invite à le partager.
Note : Pour ma part, je n’ai jamais vu de corrélation entre les variations du CAC 40 et la santé économique de la France, ni dans un sens, ni dans l’autre. L’indice n’a pas été créé pour être un indicateur économique et il accompagne généralement ses homologues européens avec un bel instinct grégaire. Sans doute faut-il regarder les indices boursiers avec la même circonspection que les investissements étrangers et les « bonnes notes » accordées par les créanciers aux pays les plus capables de s’enfoncer dans l’endettement. — TB